Développement humain : le double « je » de l’africain
Avez-vous déjà lu le bilan d’un dirigeant sous les tropiques ? Généralement, un catalogue de bétons, de blocs granitiques, de tonnes de bitume voire des milliers de lampadaires ou d’hectares de gazon. Encore plus affligeant lorsqu’on vous sort des tonnages entiers de conteneurs de pesticides, de désherbants voire de semences débarqués d’ailleurs dans le domaine agricole ; en guise de bilan de mandat électif. Au menu du consommable officiel africain trônent, invariablement, en première place, les meubles italiens, les costumes français ou les voitures américaines… D’où la question basique qui vient à l’esprit : mais où se trouve la place de l’homme citoyen dans tous ces bilans ?
Ailleurs, le présentateur médias sait qu’il doit ouvrir l’antenne avec le taux de chômage national et le climat avec au passage l’ampleur du péril du moment : inondation, canicule, incendie de forêt, foyers épidémiologiques, bref, des trucs qui concernent directement le vécu des citoyens. Un ministre français ne peut se rendre en conseil des ministres sans avoir actualisé ses derniers chiffres en matière de chômage, paraît-il. Une manière de faire comprendre que tout se fait pour l’homme. Le développement c’est lu, l’homme citoyen ; sa vie au quotidien, l’environnement dans lequel il se couche le soir, la qualité et la quantité de ce qu’il parvient à manger, sa santé, son bien-être en général.
Pour en revenir à notre cher terroir, l’Afrique, l’ingénieur ne s’embarrasse d’aucun scrupule lorsqu’il s’agit d’opérer des choix dans une zone marécageuse au cœur de Cotonou, de Yamoussoukro ou de Lama-Kara par exemple : c’est la route ou l’infrastructure à réaliser qui doit être épargné de l’invasion des eaux et non les habitations de l’homme citoyen. Rien que l’étape de terrassement permet le déversement de tonnes de sable ou de gravats sur la chaussée. A la fin, vous avez le joyau splendide surplombant les cimes des cases plus exposées que jamais. A peine si on reconnaît aux occupants potentiellement sinistrés la qualité de contribuable à l’amortissement des fonds de réalisation des infrastructures en question.
Ne sommes-nous plus les champions de l’humanisme et de la solidarité ? L’heure n’est peut-être pas encore à l’exigence d’allocation chômage à tous les jeunes sans emploi du continent dont certains partent en mer ou en esclavage en Libye. Néanmoins, un pas pourrait être franchi si l’effort des gouvernants ne se limite pas à construire des bâtiments modernes pour les services publics uniquement. Le petit fonctionnaire peut espérer dormir le soir dans un local saint avec sa famille à la sortie des bureaux climatisés du service. Tout comme les riverains des voies nouvellement construites souhaiteraient ne plus dormir sur des échassiers de fortune une fois le chantier achevé. En clair faire le développement pour l’humain, le citoyen d’abord.
Moussa Banao
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